Aujourd’hui, parlons autiste ! Je vais vous parler d’un passage que beaucoup ont rencontré et rencontrerons : l’annonce du diagnostic d’autisme chez l’un de vos enfants.
Je ne suis pas là pour donner des leçons, faire du misérabilisme, vous donner un cours sur qu’est-ce qu’un autiste ou faire de la fausse positive attitude malgré mon goût immodéré pour Lorie et sa discographie flamboyante. Je n’aurai pas l’outrecuidance de dire que ce que je dis est juste. Je dirai donc ma vérité, vérité que j’aurai adoré lire il y a 4 ans et puis ça m’a permis de placer « outrecuidance » dans cet article, et croyez-moi, je n’écris pas ce mot tous les jours.
Si tu tombes, on tombe ! Beuuuuarrr !
La merde, c’est comme la pluie : un jour, elle vous tombe sur la gueule.
La question est de savoir comment on l’affronte : Soit vous partez en courant et vous finirez de toute façon trempé sans avoir rien appris, soit vous sortez votre Tahiti Douche et vous en profitez pour faire un brin de toilette (là, je parle de la pluie, pas de la merde). C’est le fondement même de la grande équation qu’il faut chaque jour résoudre : face à l’autisme, est-ce que je fuis ou est-ce que j’en fais une force ?
Et si on se disait les choses pour une fois ?
Chapitre 1 : Il est un peu bizarre, mon fils…
En 2010, un petit indien apparaît dans notre vie. Appelons le Caramel.
Passé l’effroi du « Wouahputain, va falloir que j’assure maintenant » que tout parent connait, nous passons 2 années géniales avec un pch’ti bonhomme qui grandit, rampe, gazouille, se marre, bave et chie… Bref, un bébé.
A un an et des bananes, il se dresse sur ses petites gambettes dodues et j’adore lui changer sa couche en lui chantant une version très personnelle de Charlie Winston « Like a Hobo ».
A deux ans, il est super canon et tout le monde essaie de lui chopper les joues pour lui faire des poutous poutous. Il n’aime pas ça et est globalement timide. Il ne parle quasiment pas. Cela ne nous inquiète pas car c’est notre premier enfant et nous n’avons pas de points de comparaison avec d’autres enfants du même âge…
Aaaah, la comparaison…« Ça se réglera avec l’entrée à l’école », « chaque enfant a son propre rythme, tu sais », « tous les enfants sont différents », etc… Préparez-vous à entendre ces sérénades à la c**.
A Noël, nous nous rendons chez ma grand-mère.
Imaginez la scène : une pièce bruyante pleine de cousins avinés qui commencent à parler politique, mamie qui se rue sur son petit-fils… qui se casse en hurlant devant les regards incrédules… Bonjour Madame la gêne ! On va bientôt être très copains !
Quelques jours plus tard, nous nous extasions sur une de ses réalisations : il a aligné ses 50 voitures Cars les unes derrière les autres à la queue leu leu avec une précision incroyable. C’est cette scène, je crois, qui aurait dû nous mettre la puce à l’oreille. C’est un signe annonciateur manifeste, encore faut-il le savoir.
Les 3 ans arrivent, toujours pas grand-chose niveau langage ou alors du très fonctionnel. Il est à peu près propre et a une passion dévorante pour un dessin animé « Petit Ours ». L’histoire d’un crétin d’ourson niais au possible qui vit des aventures de ouf ou presque : (wouuuh, je me mets une écharpe quand il fait froid… Je suis un ouf moi !).
Allez aujourd'hui, prenons des risques ! Allons manger des tartines !
Entre temps, ma chère et tendre a eu la bonne idée de retomber enceinte. Mon deuxième fils, Mandarine, arrive début août et la réaction de Caramel est… très négative puisqu’il a des nausées dès qu’il voit son frère (oui oui, il en dégueule), s’enfuit dans la rue, hurle… Bref, ce n’est pas gagné.
« Ah tu sais, moi c’est pareil, Concombre a mal vécu l’arrivée de Carotte, ça se réglera avec le temps »… Ça aussi, on l’a entendu des dizaines de fois.
Bref, Caramel rentre en maternelle.
Chapitre 2 : Il a un petit TED, votre fils
Au bout de 5 jours, le téléphone sonne : c’est son instituteur.
Ce qu’il nous dit est assez clair « Il y a un problème avec Caramel. Il ne se mêle pas aux autres, se roule par terre, bref, c’est chaud patate. » (Oui, j’avoue, j’ai inventé la fin de la phrase).
C’est alors que nous commençons à réellement ouvrir les yeux sur notre fils et sa « particularité » sans trop savoir à quoi s’attendre (si vous voyez un gosse qui ne parle pas beaucoup, vous pensez d’emblée à l’autisme, vous ? Et puis c’est quoi d’ailleurs l’autisme ? Ah oui, c’est Rain Man, c’est ça…).
L’instituteur nous encourage à prendre RDV chez une orthophoniste pour un diagnostic que nous pensons bêtement lié à un retard de langage car oui, là, c’est clair : nous avons devant les yeux les 30 chiards hurlants de sa classe : il n’a pas un retard verbal « qui se réglera à son entrée à l’école » : c’est un gouffre.
Rendez-vous est pris chez une gentille orthophoniste sortie de l’île aux Enfants qui après une « entrevue » avec Caramel nous annonce le désormais mythique : « Oh, à mon avis, il a un petit TED ».
Ça a l’air sympa, le petit TED. Ça fait penser à un ourson qui boit de la bière et j’aime ça, moi !
Nous, on boit des bières et on se pète les maxillaires en regardant Petit Ours !
Alors comme tant d’autres avant nous, nous tapons « TED » ou « Troubles Envahissants du Développement » dans Google et là… le ciel nous tombe sur la tête, littéralement. En fait, TED, c’est un TSA. Et TSA… C’est un trouble du Spectre Autistique. Bref, Caramel est autiste. Vous voyez, ça fait bientôt 5 ans et j’ai encore du mal à l’écrire.
Là, vous passez par plusieurs états. La colère, la tristesse, etc…Moi, ça a été pendant un certain temps la négociation… et je crois que je n’ai toujours pas fini. Je me suis forcé à croire que non, ce n’était pas possible, qu’ils s’étaient trompés. Commencent alors les argumentations.
- Mon fils n’a rien à voir avec Rain Man donc ce n’est pas ça, forcément.
- C’est quoi ? Une maladie ? Comment ça se soigne ?
- Ah, ce n’est pas une maladie ? Bon bah ce n’est pas grave, alors !
- Il ne regarde plus dans les yeux ? Il est timide, c’est tout !
- Comment ça un handicap ? Mais il voit, il entend, il baragouine, il marche !
- Ah oui, c’est vrai, un trisomique fait tout ça aussi pourtant il est handicapé, pas malade…
- Pour combien de temps ? Pour tout le temps ? Vous vous foutez de moi !?
- Mon fils est handicapé ? Non, c’est hors de question !
- Ah, l’autisme est considéré comme un handicap ? Mais c’est penser d’une autre façon… Pourquoi utiliser le terme handicapé ?
- Autiste OK mais handicapé non !
- Oui, le monde a un souci avec la différence… Bon, bah je vais changer le monde alors.
- Il met du temps à changer, ce fichu monde, dis-donc.
Chapitre 3 : Combattre l’ignorance, ça commence par soi-même
a) Comprendre le jargon, abréviations, etc…
Bienvenue ôh toi Maître Capello ! (zut, c’est une référence de vieux… Le mec est quand même mort il y a déjà un bout de temps).
Oui, bienvenue dans ce monde merveilleux. Le pays autistique cher à Josef Schovanec dont je reparlerai un peu plus tard. Vous allez être abreuvé de langage technique, d’abréviations… Allez hop, petit tour d’horizon de ceux que je connais. Il y en a tellement.
- TED : Troubles Envahissants du Développement. Cela englobe un certain nombre d’états comme l’autisme, le syndrome d’asperger ou les « TED non spécifiés » (ça, c’est quand on ne sait pas où cataloguer… Diable que je déteste ce mot).
- TSA : Trouble du Spectre Autistique. C’est un quasi-synonyme de TED, mais TED ça sonne mieux. Rappelez-vous l’ourson alcoolique !
- Autisme : Bah oui, c’est quoi en fait l’autisme ?
Vous serez surpris d’apprendre qu’en fait… bah il n’y a pas de réponse simple à cette question.
Pourquoi ? Parce que l’autisme, c’est un état. Une manière d’être. Ce n’est pas une maladie ou quelque chose de vraiment quantifiable. C’est un peu comme si je définissais quelqu’un en disant que c’est un humain : vous ne seriez pas beaucoup plus avancé hormis que vous projetteriez sans doute le fait qu’il n’a pas quatre pattes, une crinière (Salut à toi, Carlos Valderrama !) ou une langue de 9 mètres de long. Bref, il y a autant d’autismes que d’autistes. Pour vous donner les grandes lignes, un autiste, c’est quelqu’un avec une cheminement de pensée différent, des centres d’attention et d’intérêts différents et une « altération » au niveau des relations sociales qui entraîne du stress et tout ce qui va avec (regard fuyant, hypersensibilité, manies qui sont juste des moyens de se rassurer, etc…).
Nous autres, nous avons pour précepte que la ligne droite est le chemin le plus court pour aller d’un point A à un point B. L’autiste, lui, n’a pas le même avis. Non pas parce qu’il va faire des virages entre A et B mais plutôt parce que pour lui, C’est plutôt C et Z + d’autres lettres qui n’existent pas pour nous autres, les « neurotypiques ».
C’est pour ça que l’autisme est si « mystérieux » pour nous : nous tentons de l’analyser à travers nos yeux mais le référentiel est différent : il faut donc sortir de ses pseudos certitudes pour essayer de l’appréhender. Celui qui dit qu’il le comprend parfaitement se trompe, passez votre chemin.
L’autiste ne comprendra peut-être pas le second degré ou votre humour que vous trouverez à se tordre… Mais vous ne comprendrez pas plus pourquoi parfois il se mettra à se marrer en allumant la lumière.
C'est l'histoiiiiiire de la viiiieeeeeee !!!!
- Le syndrome d’Asperger : Les personnes qui ont ce syndrome, on les appelle les « aspis ». Rien à voir avec Dyson. Les aspis, ce sont les autistes de haut niveau qui n’ont pas de retard de langage ou de déficience intellectuelle. Vous entendrez souvent une phrase débile : « Ah ton fils est autiste ? C’est un génie alors ! » : Un aspi est un autiste de haut niveau qui a souvent quelques facultés très développées mais pas mal de retard dans d’autres. Einstein savait écrire la théorie de la relativité mais avait un niveau de rédaction d’un enfant de 6 ans, Schovanec parle 8 langues mais ne peut pas lacer ses chaussures…
b) Quoi lire et quoi regarder :
Évitons l’ignorance. Voilà quelques éléments qui vont pouvoir vous aider pour actionner la marche avant sur cette route sinueuse mais pas sans issue. En premier, regardez le film « Le cerveau d’Hugo ».
Je citerai aussi Josef, forcément. Je parle de Josef Schovanec, autiste asperger et philosophe. Un ange que j’ai eu la chance de rencontrer et qui est une sorte de porte-parole extraordinaire. Une petite recherche Google et hop ! Vous trouverez des tonnes d’interviews de ce réel personnage. En voilà un :
N’hésitez pas aussi à regarder les interviews d’Hugo Horiot, autiste lourd au départ et maintenant… bref, vous verrez mais ça donne de l’espoir.
Je suis moins fan de son bouquin « L’empereur, c’est moi » que j’ai trouvé plein de colère mais le mec mérite le détour.
Côté bouquin, je vous recommande « Louis, pas à pas », l’histoire de Francis Perrin et de sa femme Gersende. Le bouquin est top et a été retranscrit sur petit écran avec l’excellent Bernard Campan dans « Presque comme les autres » : ça va être votre vie dans les premiers temps.
Si vous avez envie de grand cinéma, on peut parler de Rain Man bien sûr mais je vais préférer des choses plus récentes comme « Le Goût des merveilles » ou « Hors Normes ».
J’ai trouvé « M.Wolff » avec Ben Affleck plutôt fun à regarder. Et puis voir un autiste dézinguer des méchants à un côté très récréatif !
Côté séries, le sujet est traité aussi : The Good Doctor, Atypical… Commencez par Parenthood que j’ai trouvé très intéressant puisqu’il n’est pas forcément 100% focusé sur le personnage autiste… qui ressemble d’ailleurs physiquement à Caramel.
Côté bouquins, je vous recommande « Ma vie d’autiste » de Temple Grandin (il y a aussi un film avec Claire Danes intitulé « Temple Grandin »), le « laissez entrer les idiots » de Kamran Nazeer, « Je suis né un jour bleu » de Daniel Tammet ou encore le surprenant « Sais-tu pourquoi je saute » de Naoki Higashida, un auteur de seulement 15 ans qui nous explique ce qui se passe dans sa tête et pourquoi il réagit de telle ou telle manière : passionnant. N’hésitez pas à vous procurer aussi les petits livres « Epsilon, un enfant extra-ordinaire » et « Epsilon un écolier extra-ordinaire » de Lydie Laurent, c’est court et rapide à lire. Idéal pour tonton Jean-Luc, tante Zaza et les copains de classe.
Il y a tant de choses à lire et à tenter de comprendre. Communiquez, parlez-en et vous allez vous rendre compte de l’impact que ça a… mais aussi de la puissance potentielle que cela représente en bonne volonté, compassion et bienveillance.
Pensez aussi à lui acheter deux-trois jouets spécialisés. La référence dans ce domaine est le site Hop Toys : http://www.hoptoys.fr/
Vous connaissez déjà des personnes qui côtoient des autistes, c’est quasiment sûr. Certaines célébrités ont d’ailleurs ouvertement des enfants autistes comme Samuel Le Bihan, Francis Perrin, Henri Leconte ou Eglantine Emeyé. Mais c’est un secret bien gardé.
Ne le cachez pas et vous allez alors entendre cette phrase très régulièrement « moi aussi, mon fils (neveu, cousin, fils de ma meilleur amie, etc… il y a des tonnes de variantes) est autiste » : vous allez être super surpris et surtout… Vous allez vous sentir moins seul. Vous rencontrerez des personnes hallucinantes qui vont vous aider et vous écouter. J’ai pour ma part fait de superbes rencontres (Big Up à toi, Dédé !) : vous en ferez aussi.
c) Comprendre ce que ça implique :
Je ne suis pas là pour vous dire que ça va être la fête tous les jours. Soyons clairs, vous allez en chier des ronds de chapeau. Vous allez rencontrer le doute, l’incertitude, la colère, la bêtise humaine. Vous aurez envie de tout envoyer balader aussi. Vous vous poserez cette question : « P***, pourquoi nous ? » et pourriez avoir envie de balancer des « Oh mais ta gueule ! » à vos potes qui ont des enfants neurotypiques et se créent des problèmes.
Pourquoi vous ? J’ai une réponse toute conne à cette question : « Parce que vous en êtes capable !« . Plus la lutte est dure, plus on triomphe. Ne lâchez pas un pouce de terrain ! Avoir un enfant autiste, ça vous forge le caractère. J’étais moi-même un « sans souci » qui avait tendance à laisser le bateau voguer.
Je suis devenu Captain Igloo ! A nous les bâtonnets de colin !
Tu sais où je vais te les mettre mes fameux bâtonnets si tu continues ?
Francis Perrin a résumé ça de façon assez simple. Nul besoin d’être pieux pour se retrouver dans son « Si Dieu m’a infligé cette épreuve pour ce dernier tiers de vie, c’est que j’en suis capable. »
La vie de famille : J’aurai du mal à définir une vie de famille standard : ça n’existe pas malgré les poncifs qu’on essaie de nous vendre ici et là.
S’il a des frères et sœurs, ce sera une grande force car cela le poussera à sortir de sa coquille. En revanche, vos gosses neurotypiques auront souvent des difficultés à comprendre pourquoi et en quoi il est différent. Ils ne comprendront peut-être pas non plus pourquoi, de leur point de vue, c’est « le chouchou ». Oui, vous allez plus vous en occuper. Oui, vous allez passer plus de temps avec lui et le protégerez plus. Que ce soit conscient ou inconscient, il est illusoire de penser qu’on peut ne pas faire de différence. Tout simplement parce qu’un autiste est différent donc on s’adapte, on colmate, on fait du mieux qu’on peut et c’est déjà beaucoup.
Vous allez aussi rencontrer dans votre famille les irréductibles de l’abnégation qui refuseront d’admettre qu’ils doivent s’adapter ou même que Caramel est autiste. « Mais non, les médecins racontent n’importe quoi ! Tu dramatises ! Je l’ai gardé un après-midi et ça s’est très bien passé ! » (soupir)
La vérité, c’est qu’ils ne comprendront pas ou peu.
Vous lirez souvent une phrase que beaucoup trouvent horribles « Faites le deuil de votre enfant », bêtise que bon nombre de psychiatres sortent encore. C’est affreux, c’est abominable et pourtant il y a un fond de vérité là-dedans.
Attention, je ne vais pas vous dire que votre enfant doit être donné pour mort, hein ! Ce que je veux dire, c’est qu’il ne sera pas comme vous l’avez imaginé et qu’il n’aura pas la vie dont vous rêviez pour lui. C’est là où est le deuil. Faites le deuil de votre enfant rêvé. Il n’existe pas.
Ça, c’est une vérité pour TOUS les parents, que notre enfant soit handicapé ou pas. Quand on a un enfant autiste, on a juste la réponse plus vite : il aura une vie différente de ce à quoi nous avions pensé et c’est finalement très bien. C’est sa vie, nous ne sommes que ses parents.
Ayons l’humilité d’accepter qu’on ne puisse pas tout contrôler et bienvenue à toi, la maturité !
Je confirme, môman ne m'avait pas vu ça !
Nous-même, nous n’avons pas la vie que nous avions projeté (sinon, je serai neurologue). Tant mieux, elle n’aurait que peu de saveur. L’unique question à se poser, c’est « Comment aura-t-il une vie heureuse et que puis-je faire pour l’y aider ? ».
La vie de couple :
J’irai droit au but : Votre vie de couple va prendre un coup de pelle dans la tronche. Si avoir des enfants met déjà le couple à rude épreuve, avoir un enfant autiste amplifie le phénomène. Vous allez donc avoir besoin d’un couple en béton armé. Certaines statistiques disent que 9 couples sur 10 pètent quand on a un enfant autiste. Je n’irai pas jusqu’à dire que je l’ai vérifié mais… oui, il y a de la casse.
Ce qui est compliqué quand on y est confronté, c’est qu’on a vite fait d’avoir un seul sujet de conversation et cela rend le quotidien passablement lourdingue. Il va donc falloir vous obliger à vous aérer la tête. C’est vital.
Pour ça, il va falloir de temps en temps faire garder votre rejeton au moins une soirée (bon, soyons honnêtes, le faire garder 15 jours pour que vous vous cassiez à Cancun, c’est moins évident). Ce n’est pas super simple de trouver une baby-sitter qui inspire confiance mais ça se trouve quand même.
Prenez soin de votre conjoint avant même votre enfant. Vous êtes une équipe alors bazardez toutes ces pensées de culpabilité ou de d’éventuels rejets de la faute sur l’autre. Ça vous empêche d’avancer et ne mène à rien. Et puis soyons francs, il faudrait être le dernier de enc*** pour reprocher ça à son conjoint. Si vous vous reconnaissez là-dedans, quittez ce blog débile immédiatement !
La vie amicale :
Quand on a un enfant handicapé, le téléphone sonne moins, ne soyez pas surpris. Certains ne se sentent pas à l’aise avec ça : laissez-les sortir tranquillement de votre vie, ils n’y ont pas leur place.
D’autres hésitent à vous appeler de peur de vous déranger. C’est donc à vous de prendre votre combiné.
Attention à ne pas les abreuver d’autisme : c’est votre vie, pas la leur. Leurs problèmes aussi sont importants même s’ils peuvent vous paraître futiles.
On peut décemment penser que « J’ai pris 2 centimètres de tour de fesses » n’aura pas un impact de fou sur votre empathie mais ça ne veut pas dire qu’il ne faut pas écouter.
Et puis bon, deux centimètres de tour de fesses, ce n’est pas rien !
Vous aurez probablement plus de mal à caler les afterworks inopinés mais ça se fait. Dans beaucoup de cas, on peut aussi se relayer avec son conjoint comme dans tout couple. L’important est de ne pas oublier de garder une vie sociale commune et que ce ne soit pas toujours dans le même sens.
La vie professionnelle :
Je vais être un peu cash (ça ne changera pas trop, j’avoue) : votre vie professionnelle ne sera pas ce dont vous rêvez.
Dans un couple avec enfant autiste, il est rare que les deux bossent à plein temps. Rendez-vous chez les spécialistes en plein journée, difficultés de garde (oui, l’autiste et la cantine ou le périscolaire, ça fait rarement bon ménage), l’AVS qui est en arrêt maladie, etc. Ça va être chiant.
J’ai rencontré souvent des couples où le mec bosse comme un malade et la femme travaille à mi-temps ou avec des horaires aménagés (ça peut être l’inverse, pas de sexisme !). Ça se fait. On peut aussi travailler de chez soi. Vous aurez peut-être envie de vous lancer corps et âme dans l’autisme en devenant patronne d’une association, AVS, éducatrice spécialisée, etc. Pour le coup, là, il y a du boulot. La mise en place de la prise en charge va nécessiter un investissement total pas compatible avec une vie professionnelle pleine mais elle a un coût non négligeable.
Se posera la question que tout le monde se pose finalement : comment ramener des sous sans trop bosser ? Quand tout est en place, ça devient un peu moins lourd et vous aurez pris du muscle entre-temps.
OK, d’accord, mais on fait quoi maintenant ?
Chapitre 4 : A vos marques, prêts, action !
L’école :
Règle numéro un : la place de votre enfant est à l’école.
Que ce soit une école ordinaire ou une CLIS, la scolarisation des enfants autistes est un droit. Ne vous attendez pas forcément à rencontrer un enthousiasme débordant car oui, un enfant autiste peut perturber la classe mais il est du ressort de l’Education Nationale de l’accueillir au mieux via notamment l’AVS, j’en reparlerai. Ne vous laissez pas intimider ou déborder par la mauvaise volonté si vous la rencontrez. Les autistes n’ont rien à faire dans des hôpitaux de jour ou des hôpitaux psychiatriques : le faire, c’est renoncer à la vie qu’il mérite. Soyez déterminé et fermes. Personnellement, ma femme en mode rottweiler les a tous mis au pli très vite. Le droit est avec vous : http://social-sante.gouv.fr/IMG/pdf/plan-autisme2013.pdf
L’AVS / AESH :
Qui c’est ça ? L’AVS, c’est l’Assistante de Vie Scolaire. Pour faire simple, c’est une personne qui va venir à plein temps à l’école avec votre enfant. Cette personne, il va falloir la recruter (généralement c’est le directeur de l’école qui s’en charge) une fois que vous aurez fait une réunion éducative avec l’équipe enseignante qui rédigera ensuite un GEVASCO. Il faudra ensuite monter un gros dossier bien chiant, rédiger un projet de vie, etc… et envoyer tout ça à la MDPH qui vous répondra 6 mois plus tard si vous êtes veinard et que vous les harcelez régulièrement. Bref, ne comptez pas trop sur une AVS lors de sa première année de scolarisation. Cette personne n’a pas pour but de faire le boulot à la place de votre enfant. Elle reformulera les consignes, s’assurera qu’il va vers les autres, ne pète pas un boulon et qu’il progresse à son rythme. Soyons clairs : il y a un gros manque d’AVS en France et les existantes ne sont pas forcément le haut du panier (nous en avons fait déjà 4 en 3 ans… pas facile de motiver du monde à 900 balles par mois) mais tout cela se structure. Grosse pensée pour cette splendide AVS polonaise qu’on nous a donné et qui parlait le français comme moi le mandarin. Ça, c’est la bonne personne pour lui apprendre à lire, doudou dis donc !
Plongez-vous dans les textes, vous devez impérativement maîtriser ce sujet. Rendez-vous sur Toupi.fr par exemple : le site est bien fait et explique tout : http://toupi.fr/
L’orthophoniste :
La plupart des autistes ont des soucis de langage puisque l’interaction n’est pas leur fort.
S’il va falloir leur apprendre à parler, ils vont aussi devoir apprendre à décoder le langage. Le français est tellement fourni en métaphores et autres figures de style ! Interaction + langage = orthophoniste. La bonne nouvelle, c’est que cette prise en charge est couverte par la Sécu. Champomy !
Pendant que j’y pense, commencez à travailler l’adaptation de votre propre langage. « Mange ton assiette, Gertrude ! Tu vas me faire devenir chèvre »… Voilà le genre de phrase qu’un autiste ne comprendra pas. Une assiette, ça ne se mange pas et maman, ce n’est pas une chèvre. Un « Gertrude, mange ta viande, tu pourras jouer aux trains après » aura beaucoup plus de succès. Personnellement, quand je prononce le mot « trains », mon fils devient curieusement trilingue (français, anglais et petit ours) ! C’est de l’ABA, nous en reparlerons.
Pensez aussi à nommer votre enfant au début de chaque phrase, il saura que c’est à lui que vous parlez.
Le psychomotricien :
Qui dit autisme dit perception différente. C’est visuel, relationnel mais aussi corporel. L’autiste ne perçoit pas son corps, l’espace ou le toucher comme nous. Pour cela, le psychomotricien peut l’aider. Mon fils adore ! Les séances sont souvent ludiques et basées sur l’interaction. Manque de bol, ce n’est pas gratuit. Comptez 40 balles la séance hebdomadaire chez un libéral.
L’ergothérapeute :
Quand il grandit, l’enfant a besoin de progresser sur la motricité fine (tenir un stylo correctement par exemple). L’ergothérapeute peut l’aider en ce sens via des exercices ludiques là encore. Idem, ce n’est pas gratuit.
L’éducatrice ABA/PECS, etc… :
Vous allez entendre plein de termes comme le PECS, l’ABA, le TEACH, le modèle Denver etc… Je ne vais pas y passer des plombes, les spécialistes feront ça mieux que moi et chaque enfant est différent, évitons donc les généralités à deux balles (j’en ai déjà beaucoup trop écrit !).
Parlons juste du PECS ou « Picture Exchange Communication System ». Le principe est simple : communiquer avec votre enfant par l’image plutôt que par la parole.
Cela va permettre d’avoir un support visuel simple pour lui expliquer ce qu’il doit faire et lui va pouvoir communiquer avec vous sans se prendre la tête avec mots : bref, avant de pouvoir dialoguer sur l’influence de Saturne sur la fécondité des coquillages maltais, nous pouvons commencer par de simple « Gertrude veux une pomme » pour commencer.
Préparez les ciseaux et la plastifieuse, vous allez y passer de chouettes soirées mais c’est très utile. Un peu de recherche vous en dira plus : https://www.pecs-france.fr
Parlons maintenant de l’ABA, méthode que j’utilise tous les jours avec Caramel.
Vous trouverez tout ce qu’il faut ici : http://www.abaautisme.org
Certains l’appellent « l’apprentissage par la carotte »… c’est assez péjoratif mais pas complètement faux.
Le principe est simple : Valoriser les actions positives de votre enfant grâce à une « carotte ». Qui dit objectif agréable dit envie de l’attendre. Si l’apprentissage est associé au plaisir… alors vous avez gagné.
Concrètement, il va donc falloir trouver ce qu’on appelle des renforçateurs. Caramel aime les trains ? Les chips ? Et bien vous allez lui donner un petit bout de chips après une belle interaction ou l’autoriser à jouer au train. La théorie est toute bête mais la pratique nécessite justement un peu de pratique. Quand Caramel fait une belle demande, vous n’allez pas lui dire « Merci » mais « YOUUUUUUHOUUUUUU, BRAVO CARAMEL !!!!!!!!! »… Oui, vous allez exagérer sa performance et vous passerez souvent pour un/une hystérique.
On s’en fout, Caramel est content et a envie de continuer à apprendre.
Le spécialiste du bidon :
Ce qui est compliqué avec l’autisme, c’est qu’il n’y a pas un protocole clair et identifié à suivre. Manque de pot, les spécialistes ne sont souvent pas d’accord les uns avec les autres.
Le psychomotricien vous dira que l’ergothérapeute ne sert à rien, le pédopsychiatre vous dira que l’ABA, c’est pour les bébés et le psychiatre vous dira qu’il a la science infuse.
Une règle fondamentale : faites comme vous le sentez !
Après plusieurs recherches et des conventions, ma femme a trouvé un courant de pensée qui prend de l’ampleur : l’autisme pourrait se passer ailleurs que dans la tête ou l’ADN et pourrait avoir une piste infectieuse.
Certains, et de plus en plus de certains, pensent que les facteurs environnementaux (métaux lourds, alimentation, pesticides, ondes…) ainsi que le système digestif dans sa globalité auraient une grosse part de responsabilité.
Charlatanisme ? Nous avons de notre côté décidé de creuser la question et avons découvert qu’une des personnes à l’origine de ça était effectivement un abruti notoire puisqu’il s’agit de Luc Montagnier, accessoirement Prix Nobel de Médecine 1983. Et il a fait quoi dans sa vie ce brave homme ?
Deux fois rien, il a juste découvert le VIH… Bref, le type n’avait pas un QI de bulot… mais ça ne le mettait pas à l’abri de se tromper. Pas d’immunité ici, on n’est pas dans Koh Lanta !
L’humble serviteur que je suis était une brêle en biologie : je serais bien incapable de donner un avis scientifique sur la question.
Du coup, nous avons donc rencontré un spécialiste. Son constat fût rapide : Il pourrait être intéressant de « nettoyer » le bidon tout rond de Caramel, potentiellement blindé de champignons et/ou de parasites. Il nous exposa que son protocole durait entre 2 et 3 ans et avait pour objectif… de sortir notre enfant de l’autisme.
Attention, je dis volontairement « sortir » et non pas « guérir ». On ne guérit pas d’un handicap.
S’en suivit alors la mise en place d’un protocole assez particulier « à l’envers ».
Habituellement, vous allez voir le médecin qui fait un diagnostic, identifie ce que vous avez et vous pose un traitement.
Par contre, si vous allez voir Docteur House, il va tester un traitement en fonction de symptômes et, suivant les effets des traitements, il va affiner le diagnostic. Ce protocole là, c’est pareil.
Le traitement étant à base de molécules sans effets secondaires potentiellement dangereux, nous ne risquions pas grand-chose alors nous décidâmes de tenter le coup.
« Au bout de combien de temps sommes-nous censés voir des évolutions ? » fût notre question.
« 2 à 3 jours si tout va bien ».
La réponse nous mis sur la réserve car il y a bien longtemps que nous ne croyons plus à la magie ni au Père Noël.
Nous découvrîmes alors des traitements comme le Fluconazole, le Combantrin, le Fluvermal… et les résultats furent spectaculaires. Cela fait bientôt deux ans et Caramel ne répète plus en boucle Petit Ours, il commence à lire, il a des potes, il rit, il nage et son langage se développe petit à petit. Bien sûr, il est autiste mais nous le sentons bien dans ses baskets et il n’a plus toutes ces choses qui le polluent et l’empêchent d’avancer.
Vous vous dites peut-être que c’est l’effet « saucisson » et que nous voyons ce que nous voulons voir. Il n’en est rien. Pour preuve, certains médicaments ne marchent pas du tout et Caramel fait donc parfois de grosses régressions mais nous affinons au fur et à mesure. Creusez la question. Sur ce qu’on m’a dit, quand le petiot a moins de 7 ans, les résultats sont positifs dans 80 % des cas et j’ai pu le vérifier sur trois enfants différents.
Je préfère aussi vous prévenir : Ce collectif de toubibs n’a pas que des supporters. En tout cas, ça a très bien marché pour nous et pour pas mal d’autres parents qui témoignent ici : Collectif PIA
Le régime alimentaire :
Si l’autisme a explosé au cours des 30 dernières années, il parait normal de se poser la question : « Qu’est-ce qui a changé dans notre environnement au cours de ce laps de temps » ?
Les OGM, la pollution, les micro-ondes, les téléphones portables, le gluten, etc…
Bref, pensez à alléger le régime alimentaire de tous les éléments transformés, privilégiez le BIO voire éliminez le gluten (nous avons fait ça pendant 3 mois : c’est très chiant au quotidien et n’a rien changé mais ce qui est vrai pour Caramel ne l’est peut-être pas pour Carotte).
Les sorties :
Quand on a un enfant autiste, il convient d’adapter certaines choses sans tomber dans l’ultra-protection. Votre enfant est dans sa bulle, évitez donc de le brutaliser mais n’amplifiez pas le phénomène. Il ne va pas adorer la foule, les endroits bruyants ou les fortes odeurs mais il a aussi besoin de s’y confronter afin d’apprendre.
Vous irez donc plus volontiers au centre commercial le matin plutôt qu’en période de forte affluence ou vous éviterez les pics d’audience dans les fêtes foraines histoire qu’il n’ait pas à poireauter 2 heures (à ce titre, la carte handicap peut devenir une bonne copine… encore de la paperasse en perspective).
Ne faites pas sauter les repas de famille, les anniversaires ou les fêtes : c’est la vie, il doit donc en faire partie.
Ci-dessous une vidéo très bien faite qui vous donnera une idée de ce que ressent votre enfant dans un centre commercial.
Faites-lui faire du sport. Les autistes adorent l’eau, généralement. Une piscine privée est souvent plus gérable qu’une plage bondée mais la plage se fait quand même pour peu qu’on renonce à dormir deux heures sur sa serviette.
Chapitre 5 : Les grandes questions sans réponse
Je vais reprendre une phrase que j’ai entendue dans Baby Boom sur TF1 : « Le plus difficile dans la maternité, c’est cette inquiétude intérieure que l’on ne peut pas montrer ». C’est Audrey Hepburn qui l’a dit et en plus de son joli minois, elle ne disait pas que des bêtises. Vous allez vous poser des tonnes de questions parfois terrifiantes, en voici un échantillon.
- Comment va-t-il se débrouiller quand je ne serai plus là ?
Pour commencer, vous n’êtes pas mort ce qui est une bonne nouvelle ! Un peu d’exercice, moins de nicotine et hop, en avant Guingamp ! L’idée est donc qu’il se débrouille quand ça arrivera car un enfant autiste est avant tout un enfant : il va donc grandir et se responsabiliser : il n’y a aucune fatalité. L’objectif est donc qu’il se débrouille tout seul comme un adulte. Si ça n’est pas possible et s’il a des frères et sœurs, ils prendront potentiellement le relais. Sinon, un juge des curatelles ou des organismes spécialisés feront le job. Faisons aussi un peu confiance à l’avenir. Vous n’avez pas idée à quel point la prise en charge des autistes s’est amélioré au cours des dernières années. Alors dans 30 ans, je pense que ce ne sera même plus un débat. Ne vous laissez pas polluer par le pourquoi, concentrez-vous sur le comment. - Est-ce qu’il aura un job ?
Bah bien sûr qu’il aura un job ! Pourquoi n’en aurait-il pas ? Il sera peut-être mathématicien, pianiste, ingénieur ferroviaire, etc. Le champ des possibles est infini.
Si son handicap est très important, il pourra travailler dans un ESAT, aux espaces verts, faire de l’apprentissage… ce sont des exemples. Nous ne fabriquons pas que des ingénieurs nucléaires et ce n’est pas plus mal. Les autistes peuvent être très recherchés dans certaines branches. Leur pensée analytique, leur honnêteté irréprochable et leur logique sont de vrais atouts. Apprenons à faire de leurs particularités des forces. Par contre, pour avoir un job, des diplômes aident. Je me répéterai donc : la place d’un autiste est à l’école. - Est-ce qu’il aura une vie de couple ? Une famille ?
Un autiste est un homme ou une femme avant tout. Il n’y a donc pas de raison que ce soit impossible. Comme dans tout couple, la difficulté, c’est de trouver la bonne personne mais ça, c’est le même dilemme que l’on soit petit, gros, blanc, noir, gay, autiste, sourd ou moche.
Chapitre 6 : Les 7 relous que vous allez rencontrer.
Vous allez rencontrer des personnes merveilleuses… d’autres moins. Petit florilège des inepties que vous allez entendre et des bien-pensants que vous allez devoir vous coltiner. Pas d’inquiétude : s’ils vont vous énerver au début, ils vous feront rire à la longue.
- Le spécialiste poltron : « Je le savais mais je ne l’ai pas dit »
Aaaah, celui-là, c’est le meilleur. Le jour où vous allez dire que votre enfant est autiste, beaucoup vont vous la sortir. « On s’en doutait », « Je le savais mais tu n’étais pas prêt à l’entendre »… Bref, des lâches qui vous renverront le fait que vous êtes un ignare avec de la peau de saucisson devant les yeux. Ne perdons pas de temps avec eux mais posons-nous la question : « qu’aurais-je fait à leur place » ?
Il m’arrive souvent de voir des parents en grande difficulté avec des gosses de 2-3 ans. Nous devons aller les voir et engager le dialogue. Peut-être le savent-ils… mais peut-être pas. Le dialogue n’a jamais tué personne alors sans forcément voir la terre entière autiste, soulevons déjà la question auprès des gens qui nous sont proches si un cas « avéré » nous saute aux yeux. Ils vous en voudront sur le coup…mais vous remercieront très vite.
Pour sortir de l'autisme, pensez à la méthode ABBA !
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- L’as de l’abnégation : « Mais non il n’est pas autiste, il est différent, c’est tout. Tous les enfants sont différents tu sais. Les médecins racontent n’importe quoi »
J’ai déjà traité pas mal ce point-là. Souvent membres de votre famille, les as de l’abnégation refuseront en bloc le fait qu’un enfant n’est pas « parfait ».
C’est finalement le même cheminement que vous avez suivi avec quelques semaines/mois de retard. Si c’est votre conjoint, ça va être compliqué. Si ça ne l’est pas, laissez couler, l’évidence mettra juste un peu plus de temps à passer de leurs yeux à leur cerveau. - Les psychiatres à deux balles : « Vous êtes de mauvais parents »
Attention, envie de coup de boule en approche.
Vous allez sans doute rencontrer des spécialistes lors de vos passage au CMP (fuyez !), des pédopsychiatres… Leur première question sera de savoir si votre conjointe ou vous-même avez eu une grossesse facile ou difficile, si vous l’avez stressé, si vous êtes de tempérament colérique, etc… bref, il vous posera la question de savoir si c’est votre faute et appuyant lourdement sur le fait que ça l’est. Ne vous justifiez jamais.
La vérité, c’est que ces gens cherchent une raison qui soit dans leur périmètre et refuseront toujours d’admettre qu’ils n’y comprennent rien. Il existe une phrase qui me plait bien : « Les gagnants cherchent des moyens, les perdants cherchent des excuses ». Vous avez en face de vous des losers : passez votre chemin. - Le gardien du temple : « T’as vu, avec moi, il progresse. Hein ? T’as vu !? »
Un autiste peut être gérable. Vous n’allez pas toujours avoir un gosse qui hurle, se roule par terre ou fait du flapping (c’est agiter les bras comme un petit papillon). C’est la récurrence qui a tendance à être lourde et fatigante mais garder un autiste 2 à 3 heures n’a rien d’une performance de haute volée. Un train, un goûter voire un dessin animé et hop, le tour est joué.
Vous allez donc adorer le compte-rendu de la personne qui l’a gardé en vie lors de 3 dernières heures quand vous allez rentrer à la maison.
Vous découvrirez que cette personne hallucinante a fait en sorte que votre enfant ne tue personne, fasse caca, fasse sa sieste voire mange ses paupiettes de veau. Incroyable.
Ne soyons pas cynique, c’est bien. Ce qui sera plus surprenant, c’est qu’on vous donnera l’impression qu’il ne l’a jamais fait avant et que c’est parce que cette personne l’a gardé que d’un coup… il a fait caca… Souriez, on ne se fâche pas avec quelqu’un qui accepte de garder Carotte ! C’est un bien très précieux même si c’est agaçant. C’est un simple besoin de reconnaissance basique qui prouve que la personne en question s’était un peu mis la pression car oui, garder votre gosse, ça fait flipper.
C’est humain. - L’allergique à la négation : « Ça va être compliqué »
Les gens ont une vague idée de votre quotidien et essaient donc de vous ménager. Ils vont donc souvent arrêter de vous dire « Non » et le remplacer par le « Ça va être compliqué ». Imaginez la scène :
« John, tu peux me garder Carotte deux heures le temps que j’enterre mon père ? »
« Ça va être compliqué, ma femme fait des courses et j’ai déjà les deux miens »
« C’est cool, Carotte adore tes enfants ! Ils pourront s’amuser ensemble. »
« Concombre n’accroche pas trop avec Carotte. Tu peux pas demander à tes parents ? »
« Non, j’enterre mon père demain, je t’ai dit »
« Et tu peux lui demander de se faire enterrer un autre jour ? Là, c’est compliqué. »
Soupir…
Vous aurez aussi le « Si tu n’as vraiment personne, je peux te dépanner », traduction « J’en veux pas de ton enfant de merde mais si je dis non, je vais culpabiliser ».
Vous pourrez aussi poser des questions auxquelles on ne vous répondra pas pour ne pas vous donner « de faux espoirs ». Par exemple, « Est-ce que mon fils saura faire du vélo ? » et vous entendrez le « On ne garantit rien mais ça risque d’être compliqué » (pour info, Caramel sait faire du vélo, ça m’a pris 2 fois 15 minutes).
Bref, ce qui est compliqué, c’est surtout de les supporter !
- L’as de l’abnégation : « Mais non il n’est pas autiste, il est différent, c’est tout. Tous les enfants sont différents tu sais. Les médecins racontent n’importe quoi »
Tu te portes volontaire pour remplacer George Clooney dans les pubs Nespresso ? Ça va être compliqué...
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- L’anti-compagnon de misère : « J’avais peur de te déranger »
Au départ, vous aviez des tonnes d’amis. A l’arrivée, vous les compterez sur les doigts d’une main. Pourquoi ?
Parce que vous êtes chiant avec votre autiste ! Il faut toujours s’adapter à votre emploi du temps, merde à la fin !
Sous couvert qu’on a donc peur de vous déranger, votre téléphone va s’arrêter de sonner. Vous êtes gaie et écoutez les problèmes des autres ? Toi, t’es ma meilleure koepine !!! Sinon… Bah vous n’êtes plus la meilleure koepine, juste la nana qui nous casse les couilles à poster des articles sur l’autisme dans Facebook.
Tiens, d’ailleurs, je la bloque, on n’a jamais été vraiment amies, tout compte fait.
- L’anti-compagnon de misère : « J’avais peur de te déranger »
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- Le gros con : « Il n’est pas si handicapé, madame ! »
Je ne pouvais pas passer à côté du gros con qui n’en a rien à foutre. Je vous raconte donc deux anecdotes.
La première : Caramel est sur une piste cyclable à l’Île de Ré avec son petit vélo. Il zigzague un peu car ce sont ses premiers tours de roue.
Arrive une grosse dinde qui, ôh misère, doit freiner.
« Attention !!!!!! » dit-elle en s’arrêtant. Caramel ne relève pas, forcément.
« Désolé, il apprend » répond ma femme.
« Il est dangereux votre fils, il zigzague. Je lui ai dit de faire attention. » crie l’hystérique dodue.
« Il est autiste, il ne comprend pas ce que vous lui dites » enchérit ma femme.
« Ohhh, arrêtez de vous trouver des excuses » nous balance l’autre dinde en repartant.
La seconde : Vous êtes au supermarché, le caddie plein. Caramel s’agite, il va falloir faire fissa. Vous empruntez donc la caisse handicapé à laquelle vous avez droit.
« Hé dites donc, vous ! C’est la caisse handicapés ! »
« Bah oui et alors, mon fils est handicapé » dites-vous, carte à l’appui.
« Ah on les voit les profiteurs. Il est aussi handicapé que moi je suis évêque ! »
Non mon pote, il est aussi handicapé que toi t’es con…Ces mecs là, vous allez en rencontrer pléthore. Vous avez plusieurs possibilités : les ignorer, leur mettre un coup de tête ou… leur mettre un coup de pied. On est toujours surpris de voir que la bêtise humaine n’a pas de limites.
- Le gros con : « Il n’est pas si handicapé, madame ! »
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Chapitre 7 : Est-ce une vie de merde qui s’annonce ?
J’ai conscience que le contenu de cet article n’est pas franchement réjouissant malgré le nombre de bêtises que je peux raconter. Croyez-moi, je préfère écrire des articles débiles.
Cela peut avoir un côté désabusant. A une époque pourtant, je faisais le malin et disait « Mon fils est comme ça et je l’aime comme ça. Si on me donnait demain un gros bouton rouge qui lui enlèverait sa particularité comme par magie, je n’appuierai pas dessus ». Ce que je peux être con, parfois. Le gros bouton, si on me le présentait, je sauterais dessus à pieds joints. Non pas parce que je n’aime pas Caramel, non. J’ai juste réalisé que son état va le faire souffrir, que le terme autiste est souvent utilisé comme une injure et en tant que parent, ça m’est intolérable.
Voilà l'exemple d'un bel abruti à qui j'aurai bien mis un coup de pied.
Notre enfant va être soumis à la rudesse et à la connerie. Nous, nous avons les moyens de faire front. Lui, il va devoir se construire.
Alors oui, c’est parfois une vie de merde mais la merde, elle tombe… puis elle sèche puis elle se décolle (diable, quelle splendide figure de style).
Vous allez apprécier à leur juste valeur tous ces petits moments magiques. La première fois que votre fils vous regarde droit dans les yeux et vous dit qu’il vous aime.
La première fois qu’il fait du vélo, chose qu’il n’était pas censé pouvoir faire. Le premier mot qu’il lira ou les fous rires avec son frère où vous vous direz « Putain, on avance ! On y arrive ! ».
Toutes ces phrases hilarantes un peu plaquées et pas complètement dans le délire qu’il sortira comme quand vous le couchez le soir et qu’à votre « Bonne Nuit, mon Caramel » il répondra. « Merci beaucoup papa, à bientôt ! » ou « Mets tes chaussures Caramel » « Maaa papa, ce nédé pas des chaussuuures, ceeee sont des bottes ! ».
Vous vous ferez du souci mais si vous y mettez tout votre cœur, il sera heureux et par effet boomerang, vous le serez aussi.
Un autiste vous apportera l’humilité, la ténacité, une bonne dose d’auto-dérision. Il vous apprendra que rien n’est immuable mais qu’il faut aussi respecter sa différence. Je vais même aller plus loin : vous allez voir le monde différemment. Mentalement, vous allez vous élever. Vous allez devenir meilleur que vous ne l’êtes déjà. Je vous le promets.
Un autiste est pur, ne ment pas et a une foule de choses à raconter, il suffit d’écouter et de regarder.
Un autiste vous aimera et ne vous jugera jamais. Il n’est pas seul puisqu’il vous a. Vous n’êtes pas seul puisque vous l’avez.
Comme le dit la pub Lu : Ouvrons lui le champ des possibles !
Sur ce, je vous fais plein de poutous !
Duck
Un grand merci pour ce magnifique billet qui m’a offert un moment de franche rigolade – et je n’ai pas souvent l’occasion de rigoler. Maman d’une fille Aspi de 14 ans, c’est plutôt la merde entrecoupée de bons, voire très bons moments qui sont , hélas, rares. Donc, lorsque je tombe sur votre billet, j’en suis émue aux larmes….de rire. Vous êtes loin du misérabilisme ambiant ou du monde magique de oui-oui. Merci, merci, merci.
C’est avec grand plaisir Marie.
Merci pour votre gentil message, portez vous bien !
Formidable, drôle et encore plus que ça ! Merci
J’adore votre article, votre ton, votre humour!
Je n’ai pas d’enfants autiste (non, sérieux, c’est pas de ma faute!) mais mon fils de 5 ans a un camarade de classe autiste qu’il aime beaucoup….et….Je suis juste intéressée par le sujet.
Ça me fait très plaisir, merci !
Si je peux informer et plus de raconter des bêtises, alors, je suis comblé !
Votre fiston est top
merci qu il est bon d avoir un regard de papa et plein d humour!!ça fait du bien…on se reconnait trop ahah bien que ma fille soit polyhandicapée avec des traits autistiques…cool de se reconnaitre merci ;=)
J’ai beaucoup de chance aussi d’avoir ma chère et tendre… Nous ne sommes que des hommes 😉
Prenez bien soin de vous et de votre petite famille
Franche rigolade et acquiescements à tout va tellement nous vivons la même chose!
Je fais partie de ces lourdes qui partage des articles sur l’autisme pour éviter d’entendre des phrases du type « ah mais on dirait pas qu’il est autiste ton fils! »
Merci en tout cas car je me suis bien bien marrée en lisant votre article! (un peu agacée aussi face aux gros cons! ça par contre ça me tord encore les boyaux j’avoue!)
Je l’aime beaucoup ça le « Il est autiste ? Ça ne se voit pas ». A se poser la question de quelle représentation ils s’en faisaient au départ.
C’est la même chose pour les cons. Comme on dit : Mieux vaut fermer sa bouche et se faire passer pour un « con » que l’ouvrir et ne laisser aucun doute à ce sujet. 😀
Un immense merci pour ce point de vue franc et encourageant. Quand on se sort tout juste d’un cancer et qu’on vous dit comme dans la pub, et ce n’est pas fini, ça pue! Mais on s’accroche, parce que pleurer n’a jamais guéri personne sinon on serait tous médecins. Et que nos enfants sont geniaux 🙂
Plein de poutous Marion !
Je ne changerai pas une ligne puisque je vis la même chose avec mon fils de 5 ans autiste haut niveau ils disent… Je vous rajouterais quand même la blague du médecin au moment du de sa reconnaissance handicap : « vous compter faire quoi ? » Ben on était venu vous voir pour ça en fait mais bon…
Merci
Aaaah, elle est excellente celle-là !
C’est vrai que quand on est devant l’ignorance, on a tendance à vouloir prendre des avis. Nous avons personnellement réglé pas mal de problèmes quand nous nous sommes mis à nous écouter mais plus important encore, à écouter notre fils. Il a son avis sur la question, il suffit juste de se montrer attentifs.
Merci pour ce partage plein d’humour, j’ai reconnu plusieurs tranches de vie, et ça fait du bien de s’arrêter pour mesurer les ‘exploits’ accomplis.
Merci de cet enrichissement qu’est votre article. Je suis orthophoniste et reçoit beaucoup d’enfants autistes, je suis en perpétuelle admiration devant les parents que je vois se débattre pour trouver la juste place de leur enfant dans notre société qui, souvent, ne propose que des solutions bancales quand on dépasse de la norme, que ce soit par le haut, pas le bas ou les côtés.. J’ai adoré le style humoristique, criant de vérité et extrêmement touchant. Je voulais préciser qu’il m’arrive de travailler avec des hôpitaux de jour qui utilisent le pecs, l’aba, le teacch, qui soutiennent qu un enfant peut aller au CP alors qu’il verbalise tout juste mais montre des compétences cognitives intéressantes … Des efforts se font, pas encore de façon généralisée mais ça viendra, je l’espère… merci encore
Merci Lorène. Je suis très heureux d’être lu par une spécialiste et surtout de lire que je ne dis pas trop de conneries ! Ça change ! 😀
C’est exactement ça! 8216 vues. Qu’est ce que j’aurai aimé lire (voir) votre article plus tôt. Papa d’un enfant de 4ans autiste (j’ai du mal à l’ecrire) je termine cette lecture à 5h34 du matin en larme pourtant du haut de mes 1m86 et 110kg l’émotion m’envahit. Mais je suis plus que déterminé « Les gagnants cherchent des moyens, les perdants cherchent des excuses » . Merci pour ce bel article; toute fois un passage m’interpelle c’est votre ou la visite chez un spécialiste de l’antibiothérapie, est ce ironique ou ça marche?
Du tout Anis, c’est très sérieux, pour une fois ! 😀
Pas mal d’autistes sont traités par des antibiothérapeutes et la personne qui traite mon fiston l’est. Ça ne veut pas dire qu’ils leur donnent forcément des antibiotiques d’ailleurs.
Je vous fais une bonne grosse bourrade virile de mecs 😉
Haha ! Il est ÉNORME cet article ! A lire impérativement !
Je transmets aux familles concernées, elles ont bien mérité ce fabuleux moment ^^
Au plaisir de vous lire 🙂
Vous allez me faire rougir Séverine !
Merci !
Bonjour Le Duck. J’ai adoré votre texte ! Je ne vous cache pas me retrouver dans bon nombre de vos situations et cela ressemble beaucoup à ma vie avec mon garçon de 10 ans polyhandicapé avec attitude autistique, non-étiqueté…(oui vous voyez moi aussi j’ai appris une seconde langue : « termes médicaux pour parents ignorants »)
Merci d’écrire sur ce sujet, merci à vous et à la maman de Caramel ! Je crois que l’infos transmise de parents à parents peut être une source inespérée (j’aurais aimé, dans ma quête, trouver ce genre de graal 😉 puisque les « spécialistes » sont si démunis face à leurs incompréhensions)
J’ai traversé les mêmes étapes de conscience, et j’adopte aujourd’hui une attitude similaire à la votre: Droit devant mon capitaine, rien n’est impossible si on dépasse les peurs de son cœur ! Qui l’aime nous suive !!!
En tant que parent-coach-éduc-chercheur 😉 , cela fait un bout de temps que l’idée de l’alimentation ayant une influence sur les troubles parasitaires m’interrogent. Pouvez-vous me dire quel spécialiste a su vous guider vers ce changement favorable (nutritionniste avec quel option?). C’est quand même fort de café (!) que ce genre d’infos, pour le bien de nos enfants, se transmettent sous la table ! (et encore là je parle de pratique acceptée officiellement, non comme Medek, Biofeedback…)
Au plaisir de lire les aventures de Caramel. Prenez bien soin de équipe. Amicalement.
Salut Christelle !
Je passerai votre message à Caramaman.
Avec tout ce qui se dit sur les pesticides notamment, le Bio ne peut pas faire de mal de toute façon.
Je vous fais un petit mail tout de suite.
Merci frère d’arme. j’aurai aimé l’écrire, mais je suis plus assez drôle, après courgette, on a fait carrote et si la première est aspie la deuxième est régressive ^_^ donc la vie c’est… comme tu dis sportive.
Et puis les fruits font pas des légumes la neurodiversité c’est dans la famille, et heureusement souvent.
la troisième olivette était un paquet surprise 8 ans apres la deuxièm et ouais ça fait bizarre d’avoir un enfant qui evolue tellement vite qu’a 15 mois elle occupe la cadette et lui apprend des trucs ^_^
la vie c’est ce qu’on en fait, le bonheur est là ou on le cherche.
big up.